biquet a écrit : 02 juin 2018, 13:09
Moi je veux bien que Froome lisse son état de forme pour envisager les doublés (Tour-Vuelta l'an dernier, Giro-Tour cette année). Mais dans ce cas, sa démonstration de Bardonnechia apparaît encore plus inexplicable. Parce qu'on va quand même pas me dire que c'est un Froome à 90 ou 95°/° qui a écrabouillé Dumoulin, Pinot, Lopez et Pozzovivo lors de cette étape.

Ces gars ne sont pas des rigolos, et je me répète encore une fois: jusqu'à cette journée, ils rivalisaient largement avec Froome, en montagne (d'ailleurs le kenyan blanc n'était que 6è sur l'addition des étapes de montagne, au matin de l'étape).
Froome a changé de "braquet", en cette journée, peut-être comme il l'avait fait le lendemain de sa défaillance "inquiétante" sur les pentes de Los Machucos (qui ont prouvé que lorsqu'il lui manque un peu d'oxygène, il peut aussi souffrir sur les très forts pourcentages ). On sait tous comment il a rétabli la situation, lors de la dernière Vuelta: en forçant sur les doses. A partir de là, impossible pour moi de ne pas mettre en relation son rétablissement de l'an dernier avec son renversement radical du dernier Giro. Et pas possible non plus de ne pas repenser au Tour de Romandie 2014, lorsqu'une AUT-express (et très discutable) était venue le sauver.
En ces 2 occasions, Froome a prouvé qu'il n'hésitait pas à taper dans la boite à pharmacie (légale, peut-être, mais en doublant les doses permises) lorsque sa condition physique s'avère incertaine.
Il y a plusieurs éléments à considérer. Sur l'état de forme, tu peux planifier les charges d'entrainement pour espérer être au mieux en 3ème semaine. C'est quelque chose qu'ils peuvent maitriser de manière relativement précise. En gros, une préparation différente de celle de Yates qui était en grande condition dès le début du Giro. Si on part sur l'hypothèse qu'ils ont prévu d'être au top sur la dernière semaine, il y a une seule performance qui sort du lot, c'est le Zoncolan. Avant, il est moyen et le lendemain aussi. Comment explique-t-on ça?
Je penche pour un mélange de plusieurs hypothèses. D'abord, une bonne journée du point de vue physique, ça arrive à tout le monde. La forme n'est jamais totalement linéaire. Ensuite, on est sûr d'une chose, la Sky est border line sur le plan médicamenteux. Sans parler de dopage à proprement parler, ils utilisent toutes les substances autorisées. Peut être qu'ils peuvent mettre le paquet une journée pour gagner quelques watts en limitant les risques d'être pris par la patrouille.
La dernière semaine, Froome est le meilleur. Il fait un excellent chrono comparativement à Dumoulin, il finit avec Dumoulin et Pozzo à Prato Nevoso puis survole l'étape de Bardonnechia et se montre intraitable vers Cervinia. Sur sa dernière semaine, il est juste plus fort que les autres. C'est tout de même un fait. Ca n'exclut pas le dopage qu'on soit d'accord. Toutefois, ça parait crédible en terme de planification.
Sur l'étape de Bardonnechia, c'est un numéro immense mais qui reste possible. On en voit rarement dans le cyclisme pour plusieurs raisons. D'abord, l'attitude très attentiste chez la plupart des leaders. Ils préfèrent ne pas prendre tous les risques pour gagner et donc ils attendent souvent la dernière ascension. Ensuite, le plus dur, ce n'est pas de rouler 80 km tout seul à l'avant. Si les mecs s'infligent des sorties avec 5000 m de D+ à l'entrainement, ils doivent pouvoir soutenir un tempo élevé durant 2h. Non, la difficulté majeure, c'est qu'il faut le faire en n'ayant pas trop de monde à sa poursuite. C'est, sur ce point, que Froome tente un pari fou. D'ailleurs, je ne suis pas certain qu'il était si confiant au moment de son attaque. A la Sky, on a préparé le coup parce qu'un top 5 voire un podium, ils doivent s'en foutre. Ils se sont dits que c'était le seul moyen de gagner le Giro. Un tel coup face à une Movistar qui compte Quintana, Valverde et Landa, ça peut être périlleux. Là, la seule équipe vraiment forte, c'était la Mitchelton et la défaillance de Yates a changé, en partie, la donne.
Bref, je regarde souvent le vélo en attendant une journée comme celle ci et quoiqu'on puisse dire, c'était un beau spectacle. Sur la probité de Froome, j'ai des doutes mais j'ai, aussi, envie de croire à un coureur comme Pinot. Intellectuellement, on ne peut pas croire à la propreté des performances de l'un (Pinot) et clouer au piloris l'autre (Froome). La différence de niveau est tout de même loin d'être monstrueuse.
Ensuite, j'entends les doutes sur la Sky et en particulier, Froome et sur la prétendue arnaque qu'il incarne. Pourquoi l'équipe avec le plus gros budget choisit un mec supposé nul pour en faire son leader incontestable? On dira ce qu'on veut mais la Sky sans Froome, c'est un seul GT. En 2014, il abandonne sur le TDF et Porte ne s'en va pas gagner le Tour.