Coeur-de-Lyon a écrit :
Peu à peu la légitimité des vieilles nations occidentales va s'effriter...
Il ne s'agit pas ici des coureurs, mais des courses. Le cyclisme est un sport avant tout de tradition, et on ne décrète pas une classique. Si les classiques majeures sont devenues ce qu'elles sont, c-à-d des courses de légende, ce n'est pas dû à des tripatouillages promotionnels d'une autorité bureaucratique, mais aux coureurs qui s'y sont illustrés. Je n'ai rien contre (par exemple) l'Amstel qui a un beau palmarès, mais cette course est sans histoire. La seule victoire de Hinault à Liège-Bastogne-Liège en 77 (édition dantesque) justifierait le statut de classique majeure pour cette course, bien plus que les 5 victoires de Raas à l'Amstel. Ce n'est pas à une instance de décider quelle course est grande. Mettre Nokere Koerse dans le World Tour au niveau des classiques ne rendra pas cette course palpitante, ni légendaire.
En tennis un tournoi peut remplacer un autre tournoi sans problème (à part sans doute Wimbledon et Roland-Garros qui ont la tradition pour eux). En cyclisme décréter que la détestable Brussels Cycling Classic (et sa dénomination est aussi horrible que la course) est la même course que Paris-Bruxelles est une escroquerie. Alors bravo au dernier vainqueur (Dylan Groenewegen), mais je me refuse à le considérer comme un vainqueur de "Paris-Bruxelles". Il n'est que le troisième vainqueur d'une nouvelle course, la Brussels Cycling Classic, qui a pris la place de la défunte Paris-Bruxelles au calendrier, rien de plus.
Tradition ? Y a-t-il ici, sérieusement, parmi les gens nés avant 2000, quelqu'un qui s'enthousiasme pour le Tour Down Under, l'ENECO Tour, le Tour de Pologne ? Si oui, qu'ils me montrent leurs carnets de santé, qu'on examine leur état mental ! Les mêmes sans doute s'enthousiasmeront pour un Tour de Turquie, un Tour du Qatar et ses déclinaisons moyen-orientales au fort parfum de dollars.
Que le cyclisme s'internationalise, pourquoi pas ? Mais faut-il forcer la chose, créer des épreuves factices comme l'UCI l'avait fait avec l'épreuve chinoise ? On dira ce qu'on veut, mais à la base, les épreuves qui ont fait le succès populaire du cyclisme se déroulent pour l'essentiel en Belgique, en France, en Italie, en Espagne, en Suisse, avec des coureurs de ces pays-là représentant la majorité du peloton. L'invention et la promotion au plus haut niveau de la Tropicale Amissa Bongo ne ferait pas jaillir des petits Coppi, Bobet ou Merckx noirs.
Les courses du WT ne devaient plus se chevaucher en 2017. Non seulement rien ne change, mais on rajoute une grosse louchée de courses, dont la moitié dénuées du moindre intérêt sportif. Le Tour de Turquie, vraiment ? Qu'est-ce qui justifie ça ? Quelqu'un peut me citer un seul coureur turc connu ? Quelle est la logique ? Tant qu'à s'ouvrir à de "nouveaux" pays, pourquoi pas intégrer une course portugaise (un pays qui a donné et qui donne toujours de bons cyclistes, même si ce sont souvent, hélas, d'immondes tricheurs) ? Pourquoi pas une course sud-américaine (l'excellent Tour de San Luis) ? Non, la Turquie, le Qatar, Abu Dhabi...
Je constate que depuis 1991 les présidents de l'UCI sont systématiquement des Anglo-Saxons, soit des types qui ont un certain rapport au profit (ils parlent de "sport" comme les Américains parlent de "démocratie" quand ils débarquent avec leurs chars pour mettre à moule un pays récalcitrant). Comme par hasard, le dopage industriel est apparu avec eux. Ils ont tué des épreuves traditionnelles comme Paris-Bruxelles (soi-disant que le kilométrage favorisait le dopage, alors que l'UCI pousse au dopage en multipliant les épreuves aux quatre coins de la planète), le Championnat de Zürich, le GP des Nations. Paris-Tours résiste, mais jusques à quand ? Que va faire l'UCI en Turquie, au Qatar et à Abu Dhabi ? Palper les biftons des émirs et autres guignols enturbannés ! C'est tout. À quand un deal avec l'État islamique pour une sorte de nouvel "Enfer du Nord" pavé de têtes décapitées ? Ce sont les mêmes financiers, après tout !
Pas content, et je le dis !