
Qui l’eût cru ? Moi, avec mon amour inconditionnel du Team Sky / Ineos, qui prend mon ordi pour écrire une présentation de cette équipe longtemps détestée pour tout ce qu’elle représentait.

Si on m'avait dit ça il y a quelques années, j'aurais bien ri ! "Mais bien sûr, c'est d'la bonne ce que tu prends ! C'est qui ton fournisseur ? Pourquoi pas Hincapie vainqueur d'une étape de montagne sur le Tour, hein !"


Seulement voilà, les temps changent. Déjà, les Wiggins, Froome, Poels qui constituaient le trident honni me concernant, ne sont plus là. Ils m'ont aidé en cela à observer des coureurs qu’en réalité j’apprécie pour ce qu’ils sont (Bernal, Kwiatkowski, notamment)
Evidemment, chacun aura pu observer que l’équipe ultra-dominatrice, castratrice de toute initiative offensive sur les grands tours où elles s’alignait pour la gagne, est dans une posture bien différente aujourd’hui. Dépassée sur les courses à étapes, elle fait figure d’outsider obligée de faire de son mieux en espérant une méforme des « vrais » favoris. Et pourtant, elle reste une des équipes les plus riches par son budget, qui avoisine les 50 millions d’euros !
Sur les courses à étapes, Carlos Rodriguez incarne l’avenir, son niveau est consistant et il décroche régulièrement des places d’honneur. Surtout, il a remporté en 2024 sa première course à étapes significative : le Tour de Romandie. De là à gagner un GT …
Egan Bernal, l’ancien prodige, peine à retrouver le niveau qui était le sien avant sa tentative de traversée de remorque sur un camion en stationnement. Il a certes fait 3ème du Tour de Catalogne, signe encourageant. Mais comment l’imaginer sérieusement s’imposer à nouveau sur un grand tour, lui qui en a déjà gagné deux dans sa carrière contrariée ?
Geraint Thomas est désormais un (très) ancien qui garde pendant quelques semaines sur une saison un niveau remarquable. Mais il est le dernier vestige d'une civilisation qui fut dominatrice et dont il ne reste presque rien.

Sur les classiques, ce n’est guère mieux. Tom Pidcock est parti à l’intersaison, Narvaez également qui était une belle satisfaction 2024. Il restera Kwiatkowski pour faire un coup dont il a le secret, mais qui sera de moins en moins probable avec le poids des années. Peut-être Sheffield qui dans son style bourrin pourrait en claquer une un jour, et de plus grand prestige que la Flèche Brabançonne déjà dans sa besace.
Parmi les nouveautés, on suivra bien sûr Axel Laurance, qui arrive cette année après de belles saisons chez Alpecin.
Simplement par curiosité et pour montrer ce que cette équipe représente, je me suis penché sur les grandes lignes du palmarès d’Ineos version 2025. Nous aurons cette année dans l’effectif :
En GT : 3 victoires et 2 podiums. 21 victoires d’étapes.
2 victoires sur les monuments (+ 2 Strade, 2 Amstel, 2 GP E3 …)
Aux Mondiaux : 4 titres et 4 podiums
Aux JO : 1 podium
2 Paris-Nice, 2 Tour de Suisse, 1 Tirreno, 1 Dauphiné, 2 Tour de Romandie
ainsi que 2 champions d’Europe CLM et un champion du monde Espoirs.
Drôle d’époque de pouvoir considérer cette équipe comme en difficulté quand on voit ce CV.
Et encore, certains sont partis qui auraient pu alourdir un peu plus la carte de visite.
Qui sont ces hommes ?
Les hommes pour le CG
Thymen Arensman – 25 ans
6° de Tirreno ET du Giro, le rouleur néerlandais reste une valeur sûre pour jouer les classements généraux. Est-ce l’époque et l’omniprésence des « marvels » qui fait dire cela, mais il tarde à passer un cap pour jouer les tout premiers rôles.
Egan Bernal – 28 ans
On a cru l’avoir retrouvé en début de saison. De belles places d’honneur sur des courses aux plateaux relevés, il a ensuite plié les ailes au fur et à mesure et a mis un terme à sa saison après le Tour. 7° de Paris-Nice, il a ensuite rapporté un podium (3°) du Tour de Catalogne et ne s’est fait expulser de celui du Tour de Suisse qu’à l’issue du chrono du dernier jour. (4° au final). Difficile d’envisager une victoire majeure sur une course à étape par les temps qui courent, mais pourquoi pas une belle étape ?
Carlos Rodriguez – 24 ans
Le plus solide des coureurs de l’équipe pour jouer le général. Auteur d’une belle première moitié de saison en 2024, il a remporté le Tour de Romandie, une étape au Tour du Pays Basque et terminé 2° au général derrière son compatriote Ayuso, ainsi qu’une étape au Dauphiné. C’est du solide. Toutefois, il est apparu moins fringant sur le Tour qu’en 2023, quand il décrochait une 5° place encourageante.
Peut-il faire mieux avec un programme peut-être plus léger au printemps ?
Geraint Thomas – 38 ans
Ca devient dur pour le vétéran … Comme à son habitude, il a commencé la saison doucement avant de monter en puissance.
27° sur le Tour de Catalogne, 13° sur le Tour des Alpes, le gallois s’est hissé sur le podium du Giro pour la 2° année consécutive.

Puis il a tenté de faire ce qu’il pouvait sur le Tour pour épauler Rodriguez, c’est-à-dire pas grand-chose. Il a achevé sa saison sur un abandon au Renewi Tour. Il repart pour une saison, peut-être la dernière ? Ce sera la 18ème chez les pros !
Les rouleurs
Jonathan Castroviejo – 37 ans
L’ancien champion d’Europe du chrono (2016, déjà) a vécu une saison bien terne. Pas de place d’honneur ni d’échappée notable. Il est essentiellement un équipier, travailleur infatigable pour rouler en tête de peloton.
Tobias Foss – 27 ans
Saison contrastée. Une belle victoire d’étape sur le Tour des Alpes qui a donné lieu à des débats le concernant. Peut-il tenir et obtenir quelque chose au général ? Après tout, on parlait là d’un vainqueur du Tour de l’Avenir. Et puis non, sur une étape sans temps mort et montagneuse il a craqué et comme il faut. Pour le reste de la saison, quelques places d’honneur sur les chronos, mais aussi une petite humiliation sur son championnat national de CLM, 2° à 1 seconde de Warenskjoeld. Pour un champion du monde de la spécialité, ça la fout mal…

Filippo Ganna – 28 ans
De sa saison 2024, on pourrait dire qu’il a glané une étape en chrono sur le Tour d’Italie, comme presque chaque année. Qu’il est champion d’Italie de la spécialité, ce qui apparaît assez injustement comme une formalité au vu de son talent. Ou encore qu’il a su remporter une étape en ligne sur le Tour d’Autriche. Car oui, Ganna sait gagner ailleurs que sur un vélo de chrono. Mais l’on retiendra surtout ses deux très beaux duels, tous les deux perdus, contre Evenepoel sur les chronos des J.O et des Mondiaux. A chaque fois pour une poignée de secondes, le belge en forme semble avoir pris la mesure du transalpin. J’imagine bien Ganna faire une prépa spécifique pour reprendre son titre mondial.

Michael Leonard – 20 ans
Le canadien au physique de grimpeur semble être plus efficace en chrono. Vice-champion du Canada en chrono chez les espoirs, il est l’auteur d’une grande échappée sur le GP de Montréal et il s’est imposé sur le prologue du Tour de l’Avenir.
Joshua Tarling – 21 ans
Le « bestiau » est champion de Grande-Bretagne du chrono et a remporté aussi celui, inaugural, du Gran Camino. Il aurait surtout pu espérer une médaille olympique à Paris sur la spécialité, sans un incident mécanique qui l’a rejeté deux petites secondes derrière Van Aert qui a hérité de la 3° marche du podium. Rageant. Egalement 4° aux Mondiaux du CLM, c’est un coureur qui devrait faire mal dans les années à venir. Notons qu’il était aussi dans le coup sur A travers la Flandre dans une journée spéciale « gaziers » : 6ème. A suivre !
Les grimpeurs (plus ou moins)
Laurens De Plus – 29 ans
L’homme à la cascade impressionnante dans le mur de Sormano (en 2017, déjà!) a terminé 5ème du Dauphiné. Après une 10° place sur le Giro en 2023, il a aussi fait 15° du Tour en cette année 2024, sa quatrième pour les anglais d’Ineos. Encore deux ans de contrat pour lui ; on devrait le voir à l’avant des courses montagneuses et pourquoi pas, profiter d’un coup tactique pour lever les bras.
Omar Fraile – 34 ans
Comme beaucoup de coureurs de cette formation, l’ancien champion d’Espagne a cessé de gagner lorsqu’il a rejoint l’équipe. Pourtant talentueux, vainqueur sur le Giro, sur le Tour de France, sur le Tour du Pays Basque ou le Romandie, il aurait pu être le Marc Soler local chez les British.

Oscar Rodriguez – 29 ans
Pour sa première année chez Ineos, le navarrais s’est montré discret. Il était néanmoins dans le bon coup qui voit APP s’imposer sur la dernière étape du Tour des Alpes. Puis deux top10 sur le Tour de Hongrie. Un peu léger pour celui qui terminait 2° du Mont Ventoux Denivelé Challenge en 2021. Certes loin de Miguel Angel Lopez mais devant des « noms » comme O’Connor ou Mas.
Les autres : roule-toujours, 4X4, équipiers …
Kim Heiduk – 24 ans
Connais pas. En regardant son historique, je ne vois rien de probant ou qui fasse naître des espoirs particuliers. L’impression qu’il s’est égaré dans un effectif WT …

Michal Kwiatkowski – 34 ans
Le polonais occupe une place à part dans l’effectif et dans mon estime. C’est un des rares (voire le seul?) à avoir autant gagné après avoir rejoint Ineos qu’avant. Alors certes, son titre mondial, son 1er Amstel, son premier succès sur les Strade Bianche … ont été acquis avant son arrivée. Mais depuis qu’il porte le maillot grenat, il a remporté Milan-San Remo, un autre Amstel, une autre fois les Strade et deux étapes sur le Tour. Et il n’est pas passé loin d’une troisième cette année. C’était sans compter sur un très bon Campenaerts et le jeune Matteo Vercher. Capitaine de route qui désormais choisit ses « coups ».
Salvatore Puccio – 35 ans
Equipier modèle avec aucun succès chez les pros. Pourtant il est passé tout près en plusieurs occasions : sur le Giro, la Vuelta, ou Tirreno. C’était il y a déjà plusieurs années, et il est désormais entièrement dévoué au travail de l’ombre.
Brandon Rivera – 28 ans
Plutôt puncheur, pas maladroit contre-la-montre, il a gagné une étape du Tour d’Autriche avant de s’accrocher à la 2° place du général. Egalement 8° en World Tour sur le UAE Tour.
Magnus Sheffield – 22 ans
Il n’a pas gagné cette année mais c’est clairement le coureur qui monte dans cette équipe. Vainqueur de la Flèche Brabançonne, il peut gagner n’importe quelle classique s’il est dans le bon coup et qu’il prend 100 m d’avance. Ses qualités de rouleur sont évidentes, sa 2° place sur le chrono du Tour d’Algarve en 2024 le prouve encore une fois (derrière Evenepoel et ... devant Küng)
Ben Swift – 37 ans
Le vétéran, solide gaillard, a trouvé le moyen de faire 3° sur son tour national en plus de toute l’aide qu’il apporte à l’équipe au quotidien. Pour le reste, je crains qu’il ne reste jusqu’à la fin de sa carrière celui qui a failli gagner Milan-San Remo (2016)
Connor Swift – 29 ans
Vainqueur du Tro Bro Leon en 2021 – 4° du Tour de Wallonie en 2023 – 5° de la Clasica Jaen en 2022. Voilà des lignes qui parlent et qui en disent long sur son caractère de gazier. Ne donne jamais sa part aux chiens dans les courses de guerriers.

Ben Turner – 25 ans
Un peu le même profil pour ce coureur derrière lequel on aime s’abriter (1,94 m). 11ème de Paris-Roubaix en 2022, il s’est hissé dans le top 10 du Renewi Tour cette année.
Les nouveaux !
Lucas Hamilton – 29 ans
Un grimpeur qui peine à confirmer les espoirs nés de ses belles premières saisons chez Jayco.
Cela fait bien longtemps qu’il n’a pas signé de performance au niveau de sa 4° place sur Paris-Nice (2021, année particulière certes) ou de sa victoire sur la Semaine Coppi & Bartali. Un transfert qui sonne comme un appel à l’aide pour se relancer.
Bob Jungels – 32 ans
Chez Quick-Step, il avait été meilleur jeune du Giro à deux reprises. Vainqueur de Liège-Bastogne-Liège et de Kuurne-Bruxelles-Kuurne. Chez AG2R, il avait décroché une victoire d’étape mémorable sur le Tour, acquise en baroudeur. Chez Bora, on aura beau cherché, on ne trouvera trace que d’une deuxième place début 2023 sur la Volta a la Comunitat Valenciana. Il semble désormais exclusivement un équipier. Trouvera-t-il une ouverture une fois dans la saison ? Rien n’est moins sûr. J’ai cru au départ qu’il pouvait être un renfort de choix pour épauler un cador à l’avenir dans un rôle de roule-toujours. Evenepoel ?
Victor Langellotti – 29 ans
Tranfuge de Burgos, il a accompli de jolies choses. En 2024, 2° de la classique Grand Besançon. Deux ans auparavant, il avait su prendre la bonne échappée sur une étape de la Vuelta, terminant 7ème. Mais ceci peut-il justifier la « hype » l’ayant entouré au moment de l’annonce de son transfert ? Peut-il vraiment performer au niveau World Tour ? L’avis de tous les forumeurs est demandé !

Axel Laurance – 23 ans
Quelle belle saison 2024 pour lui, sa dernière avec Alpecin. Vainqueur très tôt sur une étape de Bessèges, puis au Tour de Catalogne et encore sur le Tour de Norvège + le général, il a explosé aux yeux de ceux qui ne l’avaient pas encore repéré. Le voilà dans l’équipe la plus riche du peloton, avec probablement des responsabilités accrues et assumées. Avec quelle trajectoire ? Chasseur d’étapes tout au long de l’année, opportuniste sur des classiques façon Kwiato ?

Artem Schmidt – 21 ans
Pas tout à fait un nouveau, mais fait partie de l’équipe depuis le mois d’août. Quelqu’un connaît-il ce jeune américain ?
Samuel Watson – 23 ans
Dommage pour la Groupama-FDJ de n’avoir pas su ou voulu conserver ce jeune coureur rapide. Vainqueur sur le Tour de Wallonie, il a su tirer son épingle du jeu assez souvent lorsqu’il pouvait jouer sa carte. Quelle place chez Ineos, dans une formation peu axée sur le sprint ? Devra-t-il axer ses objectifs sur les classiques telles que le Tro Bro Leon, qu’il terminait à la 5° place en 2022 ?
A suivre :
Andrew August – 19 ans.
Très jeune et passé d’une structure club à Ineos directement, sa première année a été positive. Ce poids plume à l’aise en montagne a obtenu des places d’honneur et en second rideau, et aura su se frotter à des coureurs de renom. 25° du Tour de Norvège, il a surtout obtenu deux places de 7° sur le Czech Tour, terminant à la même place au général, à seulement 1 minute du vainqueur Marc Hirschi.