Préhistoire
Dès la Préhistoire ancienne (paléolithique moyen) le secteur connait une occupation importante, notamment reconnue autour des sites des gorges de la Loire. La route de l'étain passait par la vallée du Rhône qui était l'unique voie d'approvisionnement en minerai pour les pays méditerranéens pendant l'âge du bronze. L'étain, venu d'Armorique et de Cornouailles, était transporté jusqu'à l'estuaire de la Loire. De là, il remontait le fleuve afin de rejoindre le Rhône. Ce trajet est attesté par Diodore de Sicile qui, au ier siècle avant notre ère, parlait d'un périple de trente jours pour atteindre l'embouchure du Rhône.
Certaines sources suggèrent un passage par Roanne, d'autres par la route du Puy-en-Velay et le col du Roux, près de Saint-Cirgues-en-Montagne. Ce trafic n'était pas sans risque comme en témoigne l’hypogée de Roaix, daté de la fin du chalcolithique. Situé au quartier des Crottes, il contenait 30 corps qui tous portent des traces de blessures ou de traumatismes mortels, résultat d'une guerre locale liée au trafic de l'étain.
Protohistoire et Antiquité
Le bourg primitif de Rodumna (Roanne) fait partie du territoire des gaulois Ségusiaves. Il est fondé vers 150 av. J.-C. au croisement de plusieurs voies commerciales et d'un passage sur la Loire, vraisemblablement en rapport avec le développement du commerce des vins d'Italie entre Rhône et Loire qui est attesté au iie siècle av. J.-C. dans la région de Roanne. Le village est d'importance secondaire, principalement construit en bois et en terre ; sa surface avant Auguste (27 av. J.-C.- 14 apr. J.-C.) ne dépasse pas 10 ha.
Le mobilier archéologique trouvé sur le site antique de Roanne permet d'établir une chronologie en continuité avec les horizons "gaulois" déjà connus, du ier siècle av. J.-C. au iiie siècle de notre ère. Il s'organise autour de deux grandes voies antiques qui le traversent : Lugdunum (Lyon) - Mediolanum Santonum (Saintes) et Augustodunum (Autun) - Ruessio (Saint-Paulien). Les édifices publics, les thermes et les temples sont construits au carrefour de ces deux voies (actuelle place de Lattre de Tassigny).La ville atteint son extension maximale de 35 ha au milieu du ier siècle. Une fosse du début du iie siècle trouvée en 1977 sur le site de l'hôpital dans la rue de Charlieu, donne selon Vaginay (1981) une indication du point extrême d'expansion du faubourg nord.
Sa population passe de quelques centaines à près de 3 000 habitants.
Rodumna est mentionné sur la table de Peutinger sous la forme Roidomna — sans symbole, seulement comme une distance le long du parcours entre Forum Segusiavorum (Feurs) et Aquis Bormonis (Bourbon-l'Archambault).
Cependant Roanne, pourtant prospère dès l'époque celte, est peu à peu évincée par Feurs (Forum Segusiavorum), qui est créée par les romains — de même que Moingt (Aquis Segete) — à partir d'un petit village, bien placé il est vrai ; Forum Segusiavorum devient le centre administratif, religieux, commercial et culturel de la civitas des Ségusiaves de la fin du premier siècle avant notre ère jusqu'au début du troisième siècle de notre ère. Puis Feurs et Moingt déclinent dès la fin du iie siècle alors que Roanne, centre de fabrication artisanale très lié aux campagnes, conserve son activité. Sous les Sévères (de 193 à 235), les rapports villes-campagnes s'inversent au profit des secondes. Les plus riches des Ségusiaves quittent les villes en difficulté et rejoignent leurs domaines ou le grand commerce à Lyon ou Rome. La cause n’est pas toujours — tant s'en faut — les invasions barbares ; il faut rajouter à l'équation les troubles sociaux des années 197 et 254, les errances d'esclaves, et les révoltes rurales de 280. Ainsi on trouve des couches archéologiques portant des vestiges d'incendie à Feurs et à Roanne de même qu'aux villae de Montverdun et de La Bruyère ; mais soit ces couches sont couvertes par des vestiges du iie siècle (auquel cas les barbares sont exclus des causes possibles) soit il n'est pas encore possible de les dater.
La fosse du site de l'hôpital rue de Charlieu, qui a été datée aux années 100 à 110 (époque trajane), s'ajoute à d'autres découvertes (relativement éloignées du centre) comme deux ateliers de poterie datés de la fin du ier siècle, pour contribuer à démontrer que Roanne a conservé son activité plus longtemps qu'il n'était pense jusqu'alors.
À la suite de la première incursion des Alamans (257-259), l'armée romaine construit ou réinvestit d'anciennes places-fortes. La défense de réseau routier est assuré par des contingents Sarmates et Taïfales. Un deuxième raid des Alamans en 267, suivi d'un raid mené par la coalition des Francs et des Suèves en 275-277 achèvent de ravager le pays.
Antiquité tardive et Moyen Âge
Siège d'une importante paroisse avec l'église Saint-Étienne et le baptistère Saint-Jean-Baptiste, on pensait jusqu'à récemment que Rodumna s'est dépeuplée au ive siècle. Or des fouilles archéologiques récentes amènent à réévaluer l'importance de Roanne pendant l'Antiquité tardive et le Haut Moyen Âge.
Le château de Roanne, dont seul subsiste aujourd’hui le donjon, est édifié au xie siècle par Bérard de Roanne, seigneur des châteaux de Roanne et du Crozet, des terres de Cordelle et de Vernay. On peut poser l'hypothèse d'une coseigneurie au Moyen Âge central.
Les premières traces d’un établissement d’accueil et de soins à Roanne remontent à 1317. Une petite maison, dénommée « La Frarie », faisait alors office de lieu d’accueil pour les pauvres, pour les prêtres et religieux de passage et pour les malades.
Vers la fin du xiie siècle, la famille des seigneurs tombe. Deux puissances féodales se partagent la succession :
• d'un côté les comtes de Forez qui administrent une partie de la ville par la justice et les impôts ;
• de l'autre côté, la famille de la Perrière qui fait construire vers 1343 près du château ce qui deviendra l'église Saint-Étienne (voir plus bas : > Culture et Patrimoine > Lieux et Monuments).
Durant la Renaissance, Roanne est une ville moderne avec près de 7 000 habitants.
C’est durant le règne d’Henri IV que se développe le bourg. Outre le quartier du château dénommé aujourd’hui « centre ancien », se construisent le Bourg Neuf et le Bourg Basset qui s’étend jusqu’à la Loire.
xviie et xviiie siècles
Le 2 août 1614, des jésuites et le père Coton fondent un collège, aujourd'hui le lycée Jean-Puy, après y avoir été autorisé par des lettres patentes d'Henri IV datées de janvier 1607.
En 1630, Roanne n’est pas épargnée par une terrible épidémie de peste. À la suite de ce fléau, les mariniers construisent une chapelle dédiée à leur patron, Saint Nicolas, qui est encore de nos jours un lieu de réunion et de culte.
En 1519, 1612 et 1667, le Roannais est trois fois érigé en duché en faveur d'Artus Gouffier de Boisy, puis de Louis Gouffier, et enfin de François d'Aubusson de la Feuillade.
Les puissantes corporations ouvrières des mariniers et des charpentiers, tout en défendant leurs intérêts accompagnent le développement et la prospérité de la ville jusqu'à l'apparition de l'industrie au xviiie siècle.
Le port prospère, agrémenté de logis et hostelleries à l’intention des voyageurs et négociants.
Vers 1762, la région roannaise se spécialise dans la filature et le tissage du coton qui emploie les enfants pauvres de la maison de Charité.
On construit à Roanne le premier port sur la Loire pour transporter le charbon arrivant de la région de Saint-Étienne.
Des mariniers indépendants exploitent ce qu'on appelle des « cabanes » ou « coches de Loire » (sortes d'embarcations à voile) avec des voyageurs parfois célèbres comme Madame de Sévigné ou le duc de Richelieu. Ils peuvent rejoindre Paris par le canal de Briare. Arrivées à bon port ces embarcations sont souvent détruites et le bois vendu (le fleuve n'étant navigable que dans un sens).
Révolution française
Le 9 septembre 1792, une troupe de vétérans, de grenadiers et de gardes nationaux, venant de Lyon où ils ont massacré six officiers du 5e régiment de cavalerie et trois prêtres, ont l’intention de faire subir le même sort aux cent détenus de la prison de la ville. Le maire de Lyon, Louis Vitet, arrive avec trois bataillons de gardes nationaux lyonnais et réussit à empêcher cette répétition des massacres de septembre à Roanne.
Après la Révolution française, la ville s'organise et installe les diverses administrations dans les biens religieux confisqués, notamment le tribunal dans le couvent des ursulines.
Le principal commerce se fait par la Loire. On construit des bateaux grâce aux bois légers des monts environnants. On expédie les vins de la côte-roannaise, les toiles d'Amplepluis et de Thizy ou le coton filé.
Face à la demande croissante de l'industrie et du transport de charbon, la Loire devient insuffisante. Pour améliorer la capacité de transport, on décide la réalisation de grands travaux.
Jusque-là, la Loire s'écoule à Roanne, en deux bras :
• un lit principal à gauche, où se trouve la place de la Loire le long de la chapelle Saint Nicolas du Port ;
• un lit secondaire à droite assez marécageux sur l'actuel tracé. Au milieu de ces deux bras, une île, « L'Isle en Beaujolais » - côté de la rive rattachée à la province du Beaujolais - compte quelques maisons dont certaines furent détruites comme la chapelle Saint Nicolas de l'Isle (1880), et d'autres qui subsistent encore comme l'auberge Saint Nicolas.
Ainsi depuis 1634, les deux bras du fleuve étaient reliés par deux ponts de bois souvent détruits par les crues qui envahissent la ville.
Devant l'ampleur des travaux envisagés, après d'importantes tergiversations et autres retards dus à la crue de 1790, les plans de l'ingénieur Benoît Joseph de Varaignes sont finalement acceptés. Le chantier débute en 1792.
xixe et xxe siècles
Une digue destinée à dévier le fleuve par le seul bras droit est mise en place. Le pont de pierre sur la Loire ou « pont du Coteau » est construit sur le bras droit et achevé en mai 1834.
Roanne ayant refusé l'entrée du chemin de fer dans la ville, c'est sa voisine du Coteau qui est desservie par le chemin de fer à partir du 15 mars 1833, avec la liaison d'Andrézieux-Bouthéon, troisième ligne de France.
Entre-temps, deux banquiers roannais, Devillaine et Merle s'associent à quatre confrères suisses au travers de la Société Franco-Suisse. Ils s'installent avec François Populle dans ce qui est aujourd'hui la sous-préfecture, d'où le nom de « carrefour helvétique » donné à l'intersection des actuelles rues Jean Jaurès et Anatole France. En face à cet endroit se trouvait aussi jadis le « café helvétique ». Les banquiers obtiennent en 1827, la concession du canal latéral Roanne-Digoin. Ce dernier est creusé sur le bras gauche de la Loire et achevé en 1837. En 1838, on aménage le port et les rives.
Le 17 septembre 1852, le président Louis-Napoléon Bonaparte fait une visite à Roanne : il est accompagné par le duc de Persigny, son ministre de l'Intérieur originaire du Roannais.
Un viaduc sur la Loire construit en treize mois est inauguré en 1858.
Jusqu'en 1858, le port de Roanne est le deuxième port français. 250 000 bateaux (les « rambertes ») transitent en provenance de Saint-Rambert. Il transportent 12 millions de tonnes de charbon, acheminés vers Orléans, Paris et l'estuaire de la Loire.
Une nouvelle voie ferrée en direction de Paris par le nord et Saint-Germain-des-Fossés est achevée le 7 juin 1858. La gare construite par la compagnie du Paris-Orléans, est mise en service par le PLM à la même date.
En 1864, Roanne est la quatrième ville décorée de la Légion d'honneur par Napoléon III, dans le but de fidéliser les notables locaux. Cette distinction marque la reconnaissance de l’action du maire François Populle qui s’était opposé au pillage de Roanne par les Autrichiens après les désastres de 1815.
De 1865 à 1874, l’hôtel de ville est érigé par l’architecte Edouard Corroyer à l’emplacement de l’ancien couvent des capucins. Le théâtre à l'italienne élevé à proximité par Etienne Barberot est inauguré en 1885.
Au début de l'année 1882, Roanne connait une grève patronale importante qui radicalise ses ouvriers. Cela mène finalement à la création du Parti Ouvrier Français en octobre 1882.
Entre 1874 et 1918, on remblaie l'ancien lit principal et on aménage la place de la Loire avec les matériaux de démolition de la ville.
Le pont sur la Loire est pavé en 1889. Le tramway est installé en 1901. En 1909, les câbles électriques destinés à alimenter Roanne sont installés depuis l'usine de Pincourt du Coteau.
L'ingénieur Léonce-Abel Mazoyer est chargé de la modernisation du port de Roanne et de sa desserte ferroviaire de 1890 à 1905.
Au début du xxe siècle, le port compte 600 000 tonnes de matériaux transportés composés de charbon, vins, huiles, tissus, briques et tuiles. Son fret atteint son apogée en 1917.
Première Guerre mondiale
Pendant la guerre de 1914-1918, Roanne accueille des prisonniers de guerre allemands qui sont embauchés dans différentes manufactures de la ville. À la fin de cette guerre, la ville de Roanne a perdu 2,1 % de sa population par rapport au recensement de 1911 (soit 768 soldats décédés natifs de la ville).
Entre-deux-guerres
Le monument aux morts de Roanne conçu par l'architecte Ernest Cornu est inauguré le 1er novembre 1925.
Après le tramway, et le « tacot » du faubourg Mulsant, les premières automobiles feront leur apparition vers 1934. Pour faire face à l'évolution de la circulation le pont a depuis été élargi.
Seconde Guerre mondiale
Lors de la bataille de France en mai-juin 1940, le préfet Langeron fait évacuer une partie des archives de la préfecture de police de Paris par péniches à vapeur. L'une d'elles se retrouve bloquée, lors des derniers jours de la retraite française devant l'avance allemande, à Roanne. Roanne est occupée par les troupes allemandes le 19 juin 1940, en fin de journée. Le maréchal Pétain vient trois fois en visite à Roanne, le 11 décembre 1940, le 1er mars 1941 et le 1er août 1941 où il accueille un convoi de prisonniers à la gare de Roanne. Roanne est libérée le 21 août 1944 par le Comité clandestin de Libération de Roanne (CLR).
Après-guerre
Le 7 juin 1959, le général de Gaulle est en voyage à Roanne, il signe le livre d'or de la ville et prononce un discours devant l'hôtel de ville. Ses successeurs François Mitterrand et François Hollande sont venus à Roanne dans les années 1980 et 2010.
En 1983, un nouveau pont sur la Loire est construit sur la rocade (N7) et permet le contournement de la ville.