19 mars, San Remo : Milan San Remo est un rite, une cérémonie codifiée. L'immuable attaque longue dans le dernier replat en haut du Poggio est la seule façon pour les non-sprinteurs de l'emporter. Tadej Pogacar fait voler en éclat cette théorie. Favori pour la gagne, il utilise Formolo pour tout faire péter dès la Cipressa. Un peloton amaigri se présente au pied du Poggio, où Pogacar, insolent, se permet d'attaquer plusieurs fois dans la pente, avec Van Aert dans la roue.
Si au final Pogacar ne termine que 5eme, il montre qu'il est possible de gagner la Primavera en courant comme un iconoclaste. Son compatriote Mohoric s'occupe lui de porter la Slovénie sur le toit du monde cycliste, avec les deux derniers GT et trois des quatre derniers monuments dans la besace. Pendant ce temps-là, Van der Poel termine troisième de cette édition mouvementée pour sa course de reprise. L'entrainement lui suffit.
26 mai, Gaustatoppen : Un mois après son triomphe à Liège, au terme d'un exploit qu'on croyait réservé aux flahutes sur les classiques pavés, Evenepoel reprend les courses sur le Tour de Norvège. Au sortir d'un stage en altitude, il sort dans la montée de Stavsro (12,1 km à 7,6 %) l'exploit athlétique qui met fin au débat sur ses capacités en montagne. Calculé entre 6,4 et 6,5 watts/kg sur plus de 30 minutes d'effort, il signe une performance monstrueuse, supérieure aux meilleures montées des Pogacar, Bernal et Vingegaard. Stavsro, c'est l'écrin de la fin de saison triomphale d'Evenepoel. Dans son sillage, à moins de 30 secondes, celui qui deviendra la hype du mois de septembre sur la vuelta : Jay Vine.
12 juin, Plateau de Solaison : Roglic va gagner tranquillement le Dauphiné, personne n'en doute. Mais ce jour-là, après une démonstration collective des Jumbo-Visma c'est son coéquipier Vingegaard qui fait la plus grosse impression dans les 11,4 km à 8,9% du plateau de Solaison. Plus fort que son leader, qu'il est obligé d'attendre dans les derniers kilomètres de la montée, le danois se pose en adversaire le plus sérieux de Pogacar pour le Tour.
21 juillet, Hautacam : le Tour devient définitivement irregardable. Au bout de trois semaines de compétition, la Jumbo a imposé sur la plus grande course du monde le concept de cyclisme total. Alors que Pogacar et Vingegaard se rendent encore coup pour coup à chaque étape, la dernière grande étape de montagne se transforme en festival du guignolesque. Départ à plus de 50 de moyenne avec un Van Aert en balade solo devant le peloton. Aubisque contrôlé par Laporte et Van Hooydonck. Ascension de Spandelles totalement surréaliste, Van Aert lâchant quasiment tous les grimpeurs dans l'échappée, seuls Daniel Martinez et Tibopino

étant capable de s'accrocher à sa roue. Derrière, séance de fractionnée surréaliste entre Pogacar et Vingegaard, face à une adversité ridiculisée. Le cyclisme laisse place aux jeux du cirque, j'éteins la télé. La montée d'Hautacam se résumera pour moi à l'image en riplé de Van Aert décrochant Pogacar, et à cette stat qui fait frémir : Vingegaard sera monté seulement 15 secondes moins vite qu'Armstrong deux décennies avant sur l'arrivée au sommet la plus dure des Pyrénées.
19 août, Grenchen : Daniel Bigham fait rire, mais il roule vite. Moqué pour son absence de références sérieuses sur route, l'ingénieur du pôle performance d'Ineos inscrit son nom sur les tablettes du prestigieux record de l'heure. Avec sa position optimisée à l'extrême, son soucis du détail et ses watts de bon coureur conti pro, il n'était pourtant qu'en essais pour la tentative à l'automne de son leader, Filippo Ganna. Celui-ci pulvérisera la marque historique de Boardman, réalisée il y a plus de 25 ans sur un vélo ne correspondant pas aux normes actuelles de l'UCI.
Voilà, je pense que ça a été pour moi les 5 moments qui pèsent le plus en terme d'émotion, de surprise et d'importance dans le déroulé de la saison.
Je suis surtout centré sur le cyclisme masculin, surtout route et un peu piste, donc je passe à côté d'exploits hors normes côté féminin.
Et à titre très personnel je suis aussi content d'avoir emmené les enfants à leur première course, c'était un meeting sur piste près de chez moi avec Tesson, Sarreau, Havik, Grondin...
Sur les moments évoqués par Charlix concernant la descente de Mohoric, en mettant de côté l'aspect matos et prestige, je pense qu'en terme de pilotage avec la vitesse c'est quand même Pidcock filmé dans le Galibier, en train de doubler Louvel et Goosens, qui est le truc le plus ouf de l'année niveau descente.
Delgato en a cité beaucoup des moments, je salue sa quasi-exhaustivité, mais notez que c'est les duels bientôt, et qu'il n'aime pas Paris-Roubaix au point de le passer sous silence, notre fanboy des autopista espagnoles et chaudières colombiennes