Il est né en 1930. Comme Sean Connery ou Clint Eastwood.
Elégant sur son vélo comme le premier dans son smoking, et sachant flinguer à propos comme le second, Jean Forestier s’est distingué au cœur des années 50. L’âge d’or du vélo, ou pléthore de champions s’illustraient et rivalisaient de février à octobre.
Professionnel de 1953 à 1965, il gagne dès sa première année la Polymultipliée Lyonnaise sur des routes qu’il connaît par cœur. Une victoire d’étape sur le circuit des six provinces l’aide certainement à se faire repérer par l’équipe de France, qui lui ouvre ses portes dès 1954.
Il s’illustre alors en remportant alors le Tour de Romandie ainsi qu’une étape sur le Tour de France. En fin de saison, il est 8ème du championnat du monde remporté par Louison Bobet.
En 1955 et 1956, il remporte sûrement ses deux plus belles victoires. Toutes deux sont signées de sa marque de fabrique : des attaques franches et subites qui surprennent ses adversaires. Comme s’il voulait que ses concurrents lisent sa signature juste en-dessous de sa selle. Aussi intelligent que racé, le puncheur caractérisé qu’il était savait aussi et surtout tirer profit du marquage entre les grands favoris pour tirer son épingle du jeu.
En 1955 sur Paris-Roubaix, Jean Forestier est en tête de course, accompagné - excusez du peu - de Bobet, Coppi, Koblet, Poblet, Geminiani … Forestier attaque alors violemment. Un temps suivi par Scodeller (le vainqueur sortant de Paris-Tours), ce dernier est victime d’une crevaison et se retrouve parmi les poursuivants : Bobet et Coppi. Ces deux-là s’entendent peu, mais on s’attend à ce qu’ils reviennent sur Forestier, qui est seul contre trois. Il n’a que 200 mètres d’avance environ. Il insiste, et ne se retourne pas. Le temps joue pour lui.
Roubaix, c'est là-bas, c'est tout droit. Appuie, tire. Appuie, tire ...
Les deux grands champions derrière lui se neutralisent car ils se craignent. Aucun des deux n’est un manche au sprint et chacun craint de faire trop d’effort pour mener la chasse et ainsi hypothéquer ses chances au sprint.
A Roubaix, parce qu’il a anticipé et résisté, Forestier s’impose sur la Reine des Classiques.
L’année suivante, il remet ça sur le Tour des Flandres. Un groupe conséquent approche de l’arrivée. On remarque que Van Steenbergen et De Bruyne se marquent et s’appliquent à se faire perdre. Le puncheur lyonnais passe à l’attaque sous la flamme rouge et fait le coup du kilomètre. Les routiers-sprinteurs derrière sont piégés. Ils ne le reverront qu’après la ligne d’arrivée.
Aujourd’hui, Jean Forestier est le doyen des vainqueurs de ces deux courses prestigieuses, inscrites éternellement au patrimoine mondial de l’histoire du vélo.
Classe, le gone !!
En 1957 il gagne un deuxième Tour de Romandie, le Critérium National et une étape au Dauphiné Libéré. Il se présente en grande forme au départ du Tour. Il y a gagne le chrono par équipes avec l’armada française, et porte le maillot jaune deux jours. Il le cèdera à Anquetil dans les Alpes, lancé vers la première de ses cinq victoires. Mais entre sa fidélité à ses leaders et son talent, il ne « balance » pas les deux dernières semaines de course et termine 4ème à Paris. Le tout, paré du maillot vert. (Comme un certain Laurent Jalabert en 1995.)
Les années suivantes seront moins fastes mais il accumulera les places d’honneur sur les classiques et regagnera une étape sur le Tour. Il sera également vice-champion de France derrière un intouchable Henri Anglade, et montera sur le podium de Paris-Nice.
Jean Forestier
Paris-Roubaix 1955
Tour des Flandres 1956
2 Tour de Romandie (1954-57)
1 Critérium National (1957)
5 étapes du Tour de France (1954-55-56-57-61)
Vice-champion de France 1959
3ème de Paris-Nice 1964
7 Top10 sur les Monuments.