Avec un peu de recul, je qualifierai ce tracé de hors-sujet relativement à ce que devrait être l’épreuve la plus importante du calendrier, bien que non dépourvu de plein de bon éléments.
Le départ basque est très sympa et évite l’écueil d’arrivées en « muritos ». La première étape pourrait même déjà secouer le cocotier chez les leaders.
Les Pyrénées se suffisent amplement à ce stade de la course et offre de quoi avoir des escarmouches pour le général.
Le retour au Puy de Dôme est une prouesse logistique. Outre le côté mystique du lieu, c’est une sacrée montée, très similaire au Fedaia. L’étroitesse de la route ajoutera une difficulté supplémentaire.
Belle moyenne montagne avec les étapes d’Issoire et du Beaujolais. Ce qui reste rare sur le Tour.
Des Alpes musclées avec,il faut le signaler, dès départs compliqués où il y a du terrain de jeu pour que des échappées de costauds se forment.
Une belle apothéose dans les Vosges. Placement parfait pour mettre en valeur un autre massif que les Alpes ou les Pyrénées et un tracé qui permet de la jouer stratégique, sans épouvantail qui catalyse toute l’attention.
Alors, me direz-vous, comment autant de bons points pourraient recaler la copie ?
Et bien car j’estime que le Tour oublie totalement ses fondamentaux et ce qui devrait être l’essence d’un grand tour.
Le kilométrage plus proche d’un tour de l’Avenir que d’une Grande Boucle est un lourd manquement. D’autant plus inquiétant qu’il semble s’agir d’une tendance volontaire chez ASO. C’est l’essence même d’un sport d’endurance qui est mis à mal.
La dilution des difficultés. J’ai lu sur le forum espagnol APM qu’aucune étape ne comportait deux cols Hors Catégorie. Qu’on ne s’y trompe pas, beaucoup d’étapes sont rudes mais le concept même du Tappone, qu’on peut aisément démarquer du reste des étapes montagneuses, semble également vouer à disparaître. Encore une fois, on sacrifie là filière d’endurance.
Est-ce vraiment étonnant, pour le coup, ce tsunami de cadors quasi adolescents ?
Enfin, le Tour qui sacre un coureur complet ; c’est un poncif certes mais bien ancré dans l’identité qui émane de l’histoire de la course. Cette année, un nouveau coup de poignard dans ce trait caractéristique. La portion de kilomètres contre la montre plats est réduite à sa plus simple expression. ASO a réussi à faire pire que le Giro de cette année. Quel que soit le profil des favoris, un équilibre minimum ne peut être oublié.
Pour résumer, et en reprenant toujours une expression du forum APM : le Tour a perdu le Nord. Une image parfaite pour illustrer la carte du Tour 2023, une traversée plus qu’un tour de la France, et sa perte d’identité.
Alors certes le Tour peut jouer sur sa puissance et sa prédominance. Il peut être sauvé par son plateau exceptionnel, comme cette année. Mais s’il devait confirmer cette tendance, il serait de moins en moins représentatif de ce que devrait être un Grand Tour, LE Grand Tour.