Bon, j'ai lu deux avis sur les trois des experts plaidant la cause de Kreuziger Jr ainsi que son dossier d'analyse.
- Première remarque concernant justement ces analyses dont j'ai pu apprendre des choses intéressantes :
S'il y a plus de 36 H entre le prélèvement de l'échantillon et son analyse, le test n'est plus déclaré valable.
Il y a également une sonde de température relié à l'échantillon pendant son transport qui mesure les possibles différences de température de conservation de l'échantillon et la durée passée à telle température. Certains échantillons ont été rejetés car la différence de température excédait parfois plus de 20°C (l'échantillon en question était très louche avec un volume corpusculaire moyen bien supérieur à la normale).
D'autres ont été gardés bien qu'il y ait eu 2 à 3°C de différence pendant une à deux heures.
Lors des premières années du passeport, pas mal d'argent a été gaspillée car plus d'un échantillon sur deux a été jeté à la poubelle (mauvaise conservation, délais d'acheminement non respectés, échantillon transporté à la main :lolilol: ).
Le laborantins de Châtenay-Malabry se la coulent douce, c'est le labo parmi ceux que j'ai vu (Cologne, Lausanne, Dresde, Madrid) qui met le plus longtemps avant d'analyser les échantillons après réception, plus de 24H quand les autres le font parfois dans l'heure après la réception.
J'en conclus que le suivi est plus sérieux que je ne le pensais, et que les athlètes voulant justifier leurs paramètres anormaux par de mauvaises conservations de l'échantillon sont mal barrés.
D'autre part, le délais de 36H est assez court, et les échantillons qui n'avaient pas respecté ce délais avaient tous été prélevés hors-compétition donc sur des lieux de stages assez éloignés des labos. Allez tester les coureurs loin des labos, c'est prendre non seulement le risque que le délais soit trop courts et que l'échantillon soit très mal thermostaté lors des nombreux trajets, donc de foutre l'échantillon à la poubelle.
- Un élément que je n'ai vu rapporté nul part sur internet : on peut apprendre que Kreuziger a mentionné deux fois avoir eu des hémorroïdes lors de la dernière semaine du Giro 2011. La première fois début juin 2011, il n'indique pas la quantité de sang perdu, la seconde fois lors d'un test fin juin, il indique avoir perdu 50cm3=50mL.
Le problème, c'est qu'il avait justement été contrôlé le dernier jour du Giro et qu'il n'avait rien renseigné sur la fiche alors qu'il a soit-disant eu des hémorroïdes les jours auparavant, mais il s'en est souvenu dix jours plus tard et un mois après il a même pu nous donner la quantité de sang perdu !
Cette année-là, il avait doublé Giro et TdF. Ses paramètres sanguins semblent néanmoins normaux.
Ce scénario laisse toutefois penser à un retrait de sang le lendemain de l'arrivée du Giro en vue du TdF, et il a indiqué un épisode d'hémorroïdique au cas où ses paramètres sanguins lui feraient défaut. Lors du premier contrôle, il a sûrement été pris au dépourvu et l'a juste mentionné, puis lors du contrôle suivant après avoir échangé avec Ferrari qui le suivait à l'époque (il mentionne de nombreuses fois qu'il était allé en altitude à St-Moritz, base de Ferrari), il se sont mis d'accord sur la quantité à reporter.
- Je passe au résumé de l'avis du fameux docteur Hampton, celui-ci qui avait défendu Tiernan-Locke et dont l'UCI s'était publiquement moqué et il y avait de quoi.
Pour Kreuziger, il ne fait à peine mieux si ce n'est une bonne remarque à la fin. Mais vraiment, c'est le dernier spécialiste à qui je ferais confiance pour me défendre, il est vraiment nul, on peut voir la différence de pertinence de ses remarques par rapport aux autres qui t'amènent à te poser des questions
L'UCI, pour appuyer sa thèse du dopage, a mentionné toute une série d'études montrant l'évolution de l'hématocrite au cours d'efforts répétés sur plusieurs jours. Hampton les rejette toutes sauf une, prétendant qu'aucune ne porte sur trois semaines et qu'il n'y a pas assez de sujets pour qu'elles soient vraiment pertinentes.
La seule que Hampton retient est celle du docteur Coscetti, qui avait suivi l'évolution des paramètres sanguins des Liquigas sur le Giro 2010, étude que je ne connaissais pas et que je suis très content de découvrir. Il s'en sert pour montrer qu'il y a des variations considérables suivant les coureurs et qu'il n'y a pas de norme. Sauf que si on regarde de plus près l'étude de Corsetti, on se rend compte qu'il y a en effet des coureurs (3/9) qui ont un hématocrite qui remonte légèrement en troisième semaine mais seul un a des valeurs qui sont supérieures à celles du départ. J'ai regardé alors le classement des coureurs Liquigas et il n'y en a vraiment qu'un seul qui a fait une place au général (3ème), les autres étant au-delà de la 50ème place. Il y a de fortes chances pour que ce coureur soit celui-ci qui a eu son hématocrite qui remonte en flêche. Ah oui, ce coureur, ce serait Nibali.
Donc en fait, Hampton considère que les variations sanguines de Krezuiger au cours des GT sont normales parce qu'un coureur comme Nibali a les mêmes. Magnifique !
Mais ce n'est pas tout : on entre après dans le grand n'importe quoi, travail complètement baclé ou déformation intentionnelle ? J'ai eu du mal à comprendre ce qu'il racontait avant que je ne vérifie les dates.
Pour expliquer l'hématocrite de son client qui crève le plafond le 24 mai 2012 à 3 jours de l'arrivée du Giro, à voir son argumentation, Hampton croit que le contrôle a été effectué le jour de la victoire de Kreuziger le lendemain. Il aurait pu vérifier. Il nous dit donc que les trois étapes précédant sa victoire, il a fait pédale douce :
- une journée de transition où il a perdu 9 min sur le vainqueur, enfin sur l'échappée, il croit que Kreuziger s'est relevé à le lire
- la suivante où il perd dix minutes : c'est la journée où il essuie une terrible défaillance (qu'il ne mentionne pas).
- le lendemain matin, il est contrôlé, cette journée là, on a un sprint.
- l'étape qu'il gagne qu'il aurait fait sans puiser dans ses réserves (bien qu'il ne la gagne que de dix neuf secondes) parce que ce n'était pas encore la fin du Giro.
Comme il a pu \"se reposer\" (lol) lors de ses quatres étapes, son volume plasmatique aurait beaucoup moins diminué que la normale sur les GT, ce qui aurait eu pour conséquence une augmentation de la concentration des globules rouges (hématocrite).
Donc, d'après Hampton, le contrôle se serait déroulé au soir de sa victoire, sauf que ce n'est pas le cas, c'était juste après sa défaillance, sûrement l'étape du Giro où il en a le plus chié en plus. Toute son argumentation déjà complètement foireuse tombe alors à l'eau. Pathétique. Le mec est payé une fortune par son client pour débiter des âneries.
- Ensuite, il rejette l'idée d'une transfusion car s'il y a eu transfusion la concentration des réticulocytes auraient dû baisser drastiquement, ce qui n'a pas été le cas. Il suggère quand même qu'il pourrait y avoir une autre explication à savoir le combo transfusion + micro-doses d'EPO pour maintenir le taux de réticulocytes.
Mais il réfute cette hypothèse car Kreuziger n'a pas été contrôlé positif à l'EPO. Est-il au courant qu'un micro-dosage en EPO peut laisser une fenêtre de détection inférieure à 8H soit le laps de temps entre les limites des horaires laissées pour les contrôleurs (22H-6H) ?
- L'UCI avance la théorie du dopage à l'EPO pour expliquer l'augmentation depuis mars 2011 du taux de réticulocytes.
Hampton a décidément une grande foi dans les tests EPO car il avance que Kreuziger a passé 25 tests depuis 2010 et ils ont tous été négatifs onc l'explication de l'UCI ne peut pas être valable.
- il faut attendre les dernières pages pour trouver enfin quelque chose de convaincant : il constate que l'augmentation du taux de réticulocytes n'est pas corrélée à une augmentation du taux d'hémoglobine. Le but du dopage à l'EPO n'est pas seulement de faire monter ses réticulocytes mais que ceux-ci puisse maturer en érythrocytes pour augmenter sa masse totale d'hémoglobine.
Petite objection : il a été démontré que les réticulocytes \"transportait mieux\" l'oxygène que les vieux globules rouges. Donc, à hématocrite égale, il vaut mieux posséder un taux de réticulocytes élevé.
Cela dit, c'est effectivement assez curieux que, sur le long terme, l'hématocrite de Kreuziger ne suive pas pas la hausse des réticulocytes.
La seule explication que je vois et je ne suis pas sûr de ce que j'avance, c'est que Kreuziger se fait très régulièrement retirer un peu de sang et qu'il compense avec un micro-dosage d'EPO mais sans faire de retransfusions pour un gain relativement faible en fait, vu que son hématocirte ne monte pas.
Très très bizarre !
C'est là que l'avis du second spécialiste s'avère intéressante, il attribue cette augmentation du taux de réticulocytes à une hypothyoïdie dont est sujet Kreuziger depuis ses 18 ans. Il prend des hormones depuis cet âge-là.
Là, il y a un truc que ne me semble pas très clair, il demanderait je crois à l'UCI à contrôler ses taux, et il s'est aperçu début 2011 qu'il ne réagissait plus au traitement de 50mg/jour, il est donc passé à 75mg, puis à nouveau quelques mois plus tard, ça ne marchait plus (avec graphiques à l'appui montrant bien le taux de TSH qui a augmenté sans que je sache vraiment d'où ils sortent, de l'UCI ?) et il est passé à 100mg et ses taux sont redevenus comme avant.
Cet expert met en avant des études qui montrent assez clairement que les patients traités pour hypothyroïdie voient leur taux de réticulocytes (les hormones thyroïdiennes ont une influence sur la production d'EPO) augmenter sans pour autant que l'hématocrite ne bouge.
Ca justifierait ainsi son augmentation depuis 2011.
Par ailleurs, j'ai dernièrement été très surpris par l'affûtage de Kreuziger.
Cette photo date de l'an passé mois de janvier ! On voit presque le dessin des fibres là sous le T-Shirt. Il doit être en dessous de 4% de matière grasse là. Impressionnant.
Qu'il soit gavé d'hormones T4 (lévothyroxine) ne serait pas étonnant. De nombreux coureurs d'Alberto Salazar dont les célèbres Mo Farah et Galen Rupp souffrent aussi d'hypothyroïdisme curieusement, et sont plus squelettiques que jamais. Sont-ils comme Kreuziger vraiment malades ou en prennent-ils à des fins de dopage ?
Sur le site de Kreuziger, on voit un certificat en tchèque confirmant l'hypothyroïdie mais qui date de septembre 2014. Je vais essayer de lire l'avis du troisième expert pour voir si les infos sur son hypothyroïdie sont vraiment officielles.
Enfin, cette histoire n'expliquerait qu'une anomalie parmi plusieurs du profil de Kreuziger.
Cet exposé pourra paraître quelque peu long à certains, mais je voulais bien éclaircir certaines choses et fournir certains éléments que d'autres sites ou forums n'avaient pas mentionnés.