- 29 mai 2022, 11:23
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La rubrique hebdo de P. Lefevere dans Het Nieuwsblad:
«La façon dont je vois actuellement Remco Evenepoel rouler au Tour de Norvège : méconnaissable. Il ne ressemble en rien au coureur d’il y a un an. Chacun a déjà largement fait état de son explosivité intensifiée – comme il l’a de nouveau montré dans la première étape. Mais je trouve aussi frappante sa métamorphose mentale.
Remco roule de façon beaucoup plus stable, beaucoup plus zen. Dans la montée finale vers Gaustatoppen, Luke Plapp et Jay Vine sont restés jeudi ostensiblement collés à sa roue, sans relayer. Dans le passé, ça aurait irrité Remco et sans doute toujours maintenant. Mais je ne l’ai plus vu gesticuler sur le vélo. Il les a simplement sortis de sa roue, la meilleure réponse possible. Naturellement, il sort parfois encore de ses gonds – remember la Flèche Brabançonne – mais incontestablement il est devenu mentalement plus équilibré.
Je lis partout que Remco a accompli la meilleure performance de l’année en montée. Il a développé jeudi durant une demi-heure 6,5 watt par kilo, ce que même Tadej Pogacar n’aurait pas encore réalisé cette année. Remco lui-même parle de ses meilleures valeurs jamais atteintes. Pour les coureurs ces données sont une référence, mais ça ne me fait ni chaud ni froid. Quelle valeur ont les watts par kilo quand on ne connaît pas le poids précis et qu’on ne prend pas en compte la tactique de course, la direction du vent ou le parcours antécédent ? Je n’y accorde que peu d’intérêt. Mieux faire que Tadej Pogacar est le battre en course. 6,5 watt par kilo ne fait pas d’office Evenepoel un favori pour la Vuelta.
Un autre chiffre qui frappe l’imagination : Remco qui a dû dans la première étape de dix à quinze fois pisser. Une dernière fois encore à douze kilomètres de l’arrivée. Tout cela a à faire avec la température. Il vient d’une préparation en Espagne, dans l’hôtel en altitude de Alexander Kolobnev. De quarante degrés à Denia, il roule maintenant à dix degrés en Norvège. Si tu ne sues pas, tu dois éliminer d’une autre manière. Je suis pour le moment au Giro, où il fait très chaud. Ici, je n’ai vu presque personne pisser en chemin.
Pour qui pense que Remco participe en Norvège en raison des primes de départ : rien n’est moins vrai. Les paiements vont vers Velon, l’ambitieux joint- venture que les équipes ont fondé en 2014, mais qui huit ans plus tard a généré plus de coûts que de revenus.
Les primes de départ comptent encore provisoirement pour peu. Je l’ai déjà dit : pour les organisateurs, la crise du corona est un passe-partout. Depuis cette semaine on ne doit même plus porter un masque dans le bus, mais parles-tu avec un organisateur des primes de départ et il déblatère tout le temps du corona, corona, corona.
Au tour du Pays Basque ça a été cette année le summum. Nous avions Remco Evenepoel et Julian Alaphilippe au départ. Si je peux me permettre : la plupart des équipes n’avaient pas un seul coureur de ce calibre. Avant c’était une règle non écrite que l’organisateur paie un extra pour le champion du Monde, mais au Pays Basque, ils ne l’ont pas jugé nécessaire. Pour en remettre une couche : parce que chez nous Louis Vervaeke a dû déclarer forfait, nous n’avions que six au lieu de sept coureurs au départ. Donc nos amis Basques ont menacé d’appliquer strictement le règlement UCI. Une déduction de dix pour cent de la prime de départ parce que nous avions un coureur trop peu.
Ça ne s’est pas passé seulement parce que nous avons pu présenter un certificat médical. Je les ai menacés d’aller les années à venir au Pays Basque avec la plus grosse équipe de merde possible. Un avertissement que je n’aurais pas dû prononcer aussi fort. Jusqu’à nouvel ordre, il n’y a pas de nazes dans mon équipe.»