-Vélomen- a écrit : ↑11 févr. 2020, 18:47
Pour le coup, je ne suis pas du tout convaincu par ton argumentaire Bradounet.
Comme l'a dit allezlasse, les stages au soleil, ça ne date pas d'hier, et quand bien même, on constate que dans les années 90 (les années EPO à la louche) et les années 2000 (grosso modo, jusqu'à l'instauration du passeport bio, mais je me trompe peut être), on ne voyait pas les coureurs de GT briller en début d'année.
Ullrich n'arrivait en forme qu'à partir du Tour d'Allemagne fin mai et même, dans la seconde partie de sa carrière, qu'à partir du Tour de Suisse fin juin. C'était un cas à part, car dans un peu extrémiste et avec de gros problèmes de poids !
Mais même un LA n'était jamais en très grand forme en 1ère partie de saison. Il était en bonne forme pour l'Amstel, mais jamais avant. Il n'a jamais gagné Paris Nice, jamais Tirreno et il ne pesait pas sur les courses de début de saison. Et pour cause, il commençait souvent sa saison fin mars.
Basso était très moyen avant ses GT. En 2004, il y a un gap énorme entre sa 1ère partie de saison et son Tour de France où il termine 3ème.
Regardez les débuts de saison des coureurs du top 10 du Tour 2004 : les mecs étaient incapables d'être à leur meilleur niveau avant juin / juillet !
Ce n'est pas une question de mois de soleil au mois de janvier. Même en avril ils ne sont pas à leur top.
Perso je ne vois que le passeport bio et peut être un changement de mentalité / culture / effet de mode, les coureurs ayant compris qu'ils pouvaient briller sur le Tour en faisant un bon début de saison au préalable.
J'ai l'impression que vous avez oublié les anciens parcours de Paris-Nice et surtout de Tirreno ?
Un Thibaut Pinot ou un Quintana aurait décalé son pic de forme sur la Semaine Catalane pour attendre de faire son premier résultat. Ou aurait fait comme Birillo justement en 2004, un gros truc sur le mont Faron lors du CLM du Tour Med avant d'attendre un nouveau terrain favorable.
Les arrivées au sommet sont récentes et lorsqu'on a eu du Faron sur Paris-Nice, on a vu le futur 3e du Tour (Vinokourov) et le vainqueur du Giro (Simoni) faire 1 et 2 ! Bon, il est vrai que cette année-là, Eufemiano a découvert en Vino des qualités de leader de GT.
Allez en parler aux coureurs de la génération juste avant, ils vous diront sans doute pareil car c'est un effet de mode qui perdure et s'est amplifié.
Les frères Feillu étaient considérés comme des marginaux par le peloton français à aller habiter le mobile-home de leur grand-mère pendant l'hiver près de Fréjus. Et à la fin de leur carrière, pas mal de coureurs sont venus au renseignement pour faire pareil.
Barguil et son retard de préparation chaque année, vous croyez que c'est du à quoi ? Il est trop dilettante pour se faire mal l'hiver en Bretagne et refuse de laisser sa femme pour aller dans le sud si une semaine pourrie s'annonce. Il n'y a que les guerriers flandriens qui acceptent de rester encore au pays ou Pinot car il a un cheptel à gérer mais même lui va au Teide faire comme les autres.
Il y a une année où Moncoutié est allé habiter chez sa copine à Paris, donc il venait fréquemment s’entraîner au Polygone de Vincennes et je le croisais quelques fois le samedi lorsqu'il faisait sa sortie de foncier. Et il me racontait qu'il devait vraiment se forcer et que ça le gavait de devoir tourner en rond sous la flotte (et ça se voyait, si tu ne l'avais pas reconnu, tu ne serais pas douté qu'il était pro, il roulottait, les pistards de l'INSEP qui venaient faire leur sortie hebdomadaire sur route le mercredi pour décrasser (Rousseau, Tournant) faisaient bien meilleure impression, c'est pour dire) alors qu'il était habitué à un climat plus clément les autres années et de ce fait il était un retard par rapport aux années passées, et ça n'a pas manqué, il n'avait pas fait un grand début de saison (c'était en 2002, et l'année d'avant, il faisait ses intensités pour le Dauphiné sur le Polygone également pendant que ses potes étaient en stage en montagne
).
Ce n'est pas non plus un hasard si Bardet vous dit que c'est le meilleur mois de janvier qu'il a pu faire.
Vous allez me dire que je me sers d'un exemple pour en faire une généralité mais on ne peut nier la tendance actuelle qui voit une grosse majorité du peloton aller rechercher le soleil l'hiver ainsi que l'altitude alors qu'avant les stages en altitude était quasiment réservé aux préparation de GT. A présent, on va en altitude entre chaque course chez les Ineos, Astana, Jumbo...
Alors on peut effectivement se demander pourquoi ce changement d'attitude ?
Tout d'abord, cela semble procéder d'un effet de mode, les Américains de Motorala avaient lancé la mode bien malgré eux, ensuite on a eu Vaughters qui voulait imiter les équipes de foot et qui a rassemblé tous ses coureurs autour d'un même lieu à l'année (Gérone) et peu à peu des noyaux se sont formés et ont grossi : si on constate que le collègue de profession le fait et en tire un avantage, il vaut mieux essayer de faire pareil. Les Européens du Nord se sont mis à les imiter.
Avant les Danois restaient s’entraîner l'hiver au Danemark par exemple, et regardez à présent où ils passent la majorité de leur temps l'hiver. (Valgren, Fuglsang à Monaco rejoint par Soeren Kragh Andersen cette année).
Ensuite, comme je l'ai dit, le terrain proposé sur des Paris-Nice, Tour d'Oman, Tour de l'UAE, Tirreno offre à présent des occasions de briller aux coureurs de GT avec la multiplication des arrivées au sommet avec quelques fois de vraies étapes de montagne. Donc ça les motive pour arriver préparés plus tôt et voient ainsi un intérêt à se préparer plus sérieusement l'hiver.
Alors, on pourrait de ce fait voir cette multiplication des arrivées au sommet de bon augure si l'on souhaite voir des plateaux alléchants et des leaders se prendre au jeu dès le mois de février. Il y a un équilibre à trouver et il convient aussi d'éviter de dénaturer certaines épreuves comme l'Etoile de Bessèges ou Paris-Nice en proposant des tracés qui ne peuvent plus que consacrer des leaders de GT (grimpeur-rouleur).
Enfin, il est à préciser que, bien qu'on ait une tendance actuelle qui veut que les leaders de GT soient plus compétitifs tôt dans la saison, rares sont les coureurs encore qui se permettent d'écraser avec autant d'aplomb les courses de mars et les GT. Ça reste l'apanage des super champions de la décennie.
On a eu Froome de 2013 à 2015 (Tour d'Oman et montée stupéfiante de l'Alto de Allanadas pour un mois de février), Contador entre 2007 et 2010 et Quintana qui se permettaient d'écraser l'adversité quelques fois sur Tirreno.
Bernal l'an passé n'est pas incontestablement le plus fort en montée sur Paris-Nice et en Catalogne.
Porte monstrueux sur le début de saison 2017 était déjà dépassé par Froome dès le premier jour du TdF.
Donc ce phénomène reste à relativiser, il y a toujours bien une montée en puissance qui se produit chez la plupart des protagonistes du général des GT entre mars et mai/juillet.
Pour ouvrir peut-être le débat (car comme me le reproche Wald, je m'aperçois que je peux avoir tendance à vouloir être trop catégorique), il y a un élément aussi à prendre peut-être en compte : la venue nouvelle dans le staff des équipes d’entraîneurs venant du milieu universitaire ou de d'autres disciplines qui sont souvent étrangers à la tradition cycliste qui périodise à l’extrême l'entrainement (en gros : l'hiver, on fait gonfler le cœur, on capillarise les jambes sur pignon fixe et puis à l'approche des compétitions, on muscle le cœur par des intensités et "surtout pas l'un avant l'autre sinon le cœur n'a pas le temps de bien gonfler", combien de fois l'ai-je entendu ?)
Ceux-ci viennent parfois avec de nouvelles idées et rompent avec la tradition et se montrent de ce fait plus exigeants avec leurs coureurs d'où ils attendent des résultats (physiologiquement parlant) plus rapidement.
The Secret Pro en parlait au tout début de son blog, lui qui est plutôt de l'ancienne génération, il était assez agacé de voir des mecs extérieurs débarquer et lui dire ce qu'il devait faire pour arriver en forme dès décembre lors du premier stage. Il préférait suivre ses méthodes à lui.