J’ajouterai aux raisons de se doper développées par iskinni et les autres (estime de soi, besoin de reconnaissance, argent, carriere etc...) l’influence du
sentiment d’injustice.
Je ne sais plus quel forumeur avait posté un lien super interessant sur de vieux coureurs (americains, je crois) qui etaient de gros sportifs, de vrais amoureux du sport. En faisant leur tournée notamment en Europe, ils se sont mis à se confronter à des gars, dont des coéquipiers, qui tapaient dedans (le mec avait gaulé par hasard un coéquipier faire sa tambouille dans sa chambre d’hôtel). Et les mecs voyaient tres bien à quel point le dopage chamboulait la hiérarchie, faussait la course, niquait le game, quoi (l’article mouillait clairement le père Van der Poel, au passage...). Et donc, le type avait décidé tout simplement d’arreter la compèt’ de haut niveau car il refusait categoriquement de se doper et qu’il voyait bien aussi qu’il n’arriverait jamais à concurrencer les pharmacies, aussi bien entrainé soit-il.
Mais il faut réussir à se retirer, à abandonner, à faire autre chose, à quitter son rêve...c’est déja dur, en soi.
Imaginons que le gars en question reste sur sa ligne de conduite, à savoir ne jamais se doper, mais qu’il n’abandonne pas la competition pour autant: il va devoir faire face au sentiment d’injustice en permanence, avec, en plus, l’idée du soupçon (qui peut s’avérer faux, comme moi par exemple qui me fais des films pas possibles sur ce pauvre Froomy
), permanent lui aussi. Ca doit etre non seulement fatigant à la longue, mais aussi profondément décourageant. Il faut pouvoir encaisser cela (pauvre Bassons...).
Bon, et puisqu’on s’emmerde en cette periode de trêve, je vais vous faire une révélation, moi aussi...
Il y a bien longtemps, dans un autre métier, et alors que je baignais dans un océan de grande naïveté, j’ai découvert que des collègues tapaient dans la caisse (en fait, l’un deux me l’a avoué: peut-etre avait-il besoin de soulager un peu sa conscience auprès de quelqu’un qui lui semblait plus honnête...).
Apres quelques temps sans réaction speciale de ma part, un sentiment d’injustice de plus en plus grandissant s’est emparé de moi et mon esprit ne cessait d’en arriver à cette conclusion: je bosse deux fois plus que ces mecs (oui, parce que c’etait de sacrés glandeurs au taf) et je gagne deux fois moins.
Ne pouvant me résoudre à les balancer (d’une, parce que c’est compliqué pour moi de « balancer »; de deux, parce qu’ils auraient su que j’etais la
taupe (Patrice, si tu nous regardes ) et je me serais donc mis « en danger », mais qu’en plus leurs combines etaient tellement bien ficelées qu’elles auraient été quasi impossibles à prouver. Mon probleme de sentiment d’injustice aurait donc probablement perduré...avec d’autres problemes supplementaires, à n’en pas douter), et ne supportant plus ce sentiment.......eh bien, et dieu sait que j’en ai honte....je me suis mis à taper dans la caisse, moi aussi. En me découvrant avec le temps pas mal d’ingeniosité dans la pratique, de surcroit...
Heureusement que j’avais d’autres projets professionnels que ce boulot d’etudiant (qui nourrissait mon corps mais pas mon âme) car je ne sais pas où cela aurait pu m’emmener. On prend vite goût à cette saloperie de tricherie, sans compter que la cupidité a un pouvoir assez exponentiel (on en veut toujours plus), surtout quand c’est aussi facile...
Bref, et maintenant que vous me detestez tous
, tout ça pour dire que si j’avais été un amoureux du sport
et de la competition, et que j’avais eu quelques dispositions, je suis quasi certain que je n’aurais pas pu resister aux sirènes du dopage. Peut-etre qu’une partie de moi aurait été admirative d’un Bassons, mais qu’une autre partie m’aurait dit que je ne voulais pas être ce « looser ».
D’ailleurs, si je suis aussi dur avec le dopage et ceux dont je suis convaincu qu’ils sont de bonnes grosses arnaques (Dave, si tu nous regardes), ce n’est certainement pas que pour la beauté du sport, c’est peut-etre aussi pour questionner et sanctionner une partie de moi-meme, le
côté sombre de ma personne, allez savoir...
Alors bon, je sais bien qu’on n’éradiquera jamais tout dopage, mais quand on sait toutes les raisons d’y arriver, et quand on sait que certains ont l’honnêteté, la droiture, l’authenticité chevillées au corps, il me semble indispensable d’avoir un max de contrôles, un max d’épées de Damoclès, histoire d’essayer d’assainir les choses au maximum.
Sans compter que l’acceptation du dopage aboutirait immanquablement à du cirque plus qu’à du sport (le velo des 90’s compte son lot de délires complets
) et l’absence de toute crédibilité de la performance sur le plan humain finirait, amha, à rendre le sport sans intérêt...et donc à le tuer. Qui aurait envie de savoir quelle molécule va gagner?...