- 06 août 2018, 21:24
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Mon Tour (à J-1 par rapport aux pros) est terminé depuis un peu plus d'une semaine. C'était certainement la plus belle aventure collective que j'ai eue la chance de vivre jusque-là.
Plutôt que d'écrire un pavé (parce que chaque journée a été créatrice de centaine de souvenirs), je vais noircir cette page de quelques pensées, en vrac.
Le 1er jour, je discute avec une fille qui entame déjà son 3e Tour. Elle me dit "J'espère que cette année enfin je connaîtrai une étape sans avoir mal quelque part". Ce n'était pas pour ce jour-là, puisqu'elle souffrait de ce qu'en tant qu'homme je ne vivrais jamais. Mais arrivés dans les Pyrénées, je lui ai reposé la question. Et oui, elle a passé des étapes sans avoir de tendinite, de coup de chaud, d'inconfort à la selle, sans pieds qui chauffent... Deux jours plus tard, elle a quand même fait un mini-malaise en haut d'un col.
Moi-même, j'ai eu une semaine de douleurs cervicales et les épaules contractées à cause d'un gros coup de stress d'avant départ ; puis le gros orteil d'un pied devenu comme une boule de billard ; des coups de soleil sur les bras qui m'ont forcé à porter des manchettes dans l'étape de 230 bornes ; des maux d'estomac la dernière semaine ; les lèvres et le bout de la langue brûlées les derniers jours à cause d'un excès d'aliments salés je pense.
Le Tour, c'est soumettre à son corps à une expérience inédite, payer cash des petites erreurs anodines et les traîner plusieurs jours. Et même encore après (j'ai toujours l'orteil gonflé !)
A la fin du Tour, lors d'une étape plate, je plaisante avec une des filles les plus expérimentées du groupe. "L'autre jour, dans le pic de Nore, je me suis fait lâcher par une gamine de 13 ans [elle montait vraiment super vite, hein]. Et là, je me suis fait doubler deux fois par un bébé [dans un porte-bagage sur le vélo de sa maman, championne locale de cyclo-cross !]." Elle me répond : "Pendant le Tour, il faut mettre son ego de côté. Moi, j'ai dû me mettre deux fois en position de levrette pour que la kiné mette du tapping, et un million de personnes ont vu mes fesses (sic) [parce que pauses pipi sauvages très fréquentes].
La pudeur aussi, on la met de côté. Les filles surtout, contraintes de se soulager sur des parkings, entre deux voitures (avec parfois la surprise de voir la tête du conducteur surgir), dans des champs. Moi, j'ai fait 3 km de montée du Portet d'Aspet à fond avec mon papier toilette dans la poche arrière du maillot pour enfin trouver un petit coin sauvage. Après quoi je suis reparti couvert de ces petites boules collantes partout sur mes chaussettes et mes manchons.
Allez, trois souvenirs magiques :
- la haie d'honneur sur 100m à l'arrivée à La Rosière, totalement inattendue. J'aurais aimé vivre ce moment au ralenti pour regarder tous ces visages plein de bienveillance, remercier chacune des personnes venues nous applaudir. Une petite arche gonflée, un speaker, des sons de cloches... J'ai eu des frissons.
- les 50 derniers km de l'étape de Mende sous la pluie battante et même un épisode de grêlons qui nous a forcé à nous réfugier contre un camping-car. La température tombée de 30 à10 degrés en quelques kilomètres. Le peloton a explosé avec l'arrivée de la pluie, chacun(e) a tenté de survivre à sa façon. Et je dois dire que j'ai tellement pris de plaisir, bien équipé (top le k-way Rapha !), je me suis pris pour un Wellens dans le final d'une classique automnale. En prime, la montée Jalabert à bloc avec un pneu arrière quasi à plat, où je suis arrivé le premier et où j'ai pu encourager mes amies. Au passage, on a pris la pluie seulement deux fois en 3 semaines : une chance incroyable !
-le plus beau : la percée du soleil couchant, éphémère, en haut du Soulor noyé dans le brouillard (les remontées maritimes, phénomène classique dans ce coin-là, m'a-t-on expliqué). Il était plus de 19h. Les Basques prenaient l'apéro au bord de la route, réunis par petits groupes. Et en haut de l'Aubisque, une pena qui chantait "Aux Champs Elysées". Un clin d'oeil à la fin proche de l'épopée. Juste après, je me suis offert une descente de l'Aubisque à bloc avec les feux du fourgon suiveur qui me poussaient à accélérer. Et à l'arrivée, ambiance de marché/fête foraine à Laruns dans la tiédeur de la nuit naissante. Inoubliable.
Bon, j'ai quand même écrit un petit pavé. Désolé. Mais ce sera avec plaisir que je répondrai à vos éventuelles questions maintenant.