Allez, j'ouvre le bal des Ariégeois.
(Edit: Gradouble m'a devancé)
Enfin, c'est un peu gonflé, car normalement, pour ouvrir le bal, il vaudrait mieux être bon danseur, pour ne pas se mettre la honte, tout seul sur la piste. Mais puisque je n'ai pas peur du ridicule...
Cette Ariégeoise, je n'avais pas vraiment décidé jusqu'à la veille si je devais la faire ou non. Après un début d'année en fanfare, avec de superbes sensations et des résultats à la hauteur, le mois de juin était carrément à jeter.
Sur-entrainement plus au moins auto-diagnostiqué - le cardio qui ne montait pas, avec du coup la puissance qui plafonnait elle-même aussi à environ - 10% - suivi de repos, mais pas vraiment, un nocturne avec le coeur qui monte à tout rompre, et samedi dernier une sortie longue calamiteuse - pas de puissance, pas d'endurance.
A vrai dire, si finalement je me suis décidé d'y aller tout de même, c'est suite à deux entrainements courts cette semaine qui ne se sont pas trop mal passés, et surtout suite au "forcing" de copains cyclistes divers et variés...
Le jour J (ou plutôt H, puisque c'était "hier"), je me lève donc à 5:30 après une nuit bien pourrie (veille de cyclo, quoi) que j'avais principalement passé dans un état de demi-sommeil me faisant des films sur le déroulement de la course.
J'arrive, je prends mon dossard, préparation nickel, RAS. Il fait gris mais doux - ce qui n'allait pas changer pendant toute la course.
Le départ est donné, et tout de suite je me rends compte que par rapport à l'Albigeoise, on est sur une autre planète - ça sait rouler, ça se respecte, pas de freinages intempestifs, pas de chutes. Un jeune homme me salue - il se présente un tant que "Gradouble". Que je rigole ! Il n'est ni gras, ni double
Le Col de Port arrive rapidement (enfin, nous arrivons au col de Port rapidement, lui-même ne bouge pas). Ca monte au train, tout le monde veut en garder sous la pédale. Sans trop de difficultés, j'arrive à intégrer la tête de course à temps pour les quelques attaques (Seb Pillon, Olivier le Court, Nicolas Chatelet, un Espagnol) que je suis sans grande difficulté.
Oups ! J'ai mis des noms.... Mais ne vous inquiétez pas, je ne vais balancer sur personne :-)
Nicolas Chatelet qui d'ailleurs le temps de la course s'appelle "Max", voilà le nom sur son dossard, probablement dérobé à quelqu'un gisant le crâne en sang aux départs, car lui même n'était pas inscrit - en tout cas, c'est-ce qu'il m'a fait savoir la veille
Je fais la descente du Col de Port en tête, un énorme kif, cette route ! Ma roue avant de remplacement ne freine finalement pas si mal que ça dans le sec - j'avais eu un peu peur à ce propos.
Arrive le looooong faux plat descendant puis montant avant le Col de la Core. En bas de la descente, le peloton se regroupe, et ça ne roule pas du tout. 28 - 30 en faux plat descendant. Il y en a qui sortent en facteur, mais sans vraiment y croire, ils restent en vue. Je fais une première tentative d'accélération, mais tout le peloton me suit en file indienne.
Du coup, j'attends que tout le monde soit vraiment bien endormi, les facteurs tout juste hors de vue, et je remets ça. J'arrive en trombe sur les facteur en criant "Y a un trou !!!". Tout le monde comprends même sans que je fasse de dessin. Ca tourne, ça se relaye bien. Peu de temps après, Nico Chatelet nous rejoint.
Comme j'en ai désormais l'habitude sur les cyclos, quand il y a un gros peloton derrière, ça ne roule quasiment jamais - étant trop nombreux pour tourner, personne n'a envie de faire l'effort seul devant. Du coup, l'écart grandit jusqu'à 4:20 en bas du col de la Core. C'est de très bonne augure ! Je prends mes relais, bien appuyés, et personne ne gueule qu'il faut que je ralentisse, comme ça s'est passé en début d'année sur l'Héraultaise.
A un moment, vu que je fais quand même plus que tous les autres à l'exception d'un grand gabarit "made to roule", je me laisse tomber à l'arrière de notre échappé d'une petite dizaine, et qu'est-ce que je vois à la dernière place ? Un dossard Espagnol, un de ces fameux "ratus hispanicus" qui, sur les dizaines de km de faux plat, n'avait pas pris un seul relais. Ah, il y a des baffes qui se perdent. Je ne sais pas, si dans ce pays ils se prennent tous pour Valverde...
Arrivé donc en bas de la Core avec une avance confortable. Je fais le pied de la montée en danseuse, à 95%. Peut-être aussi que c'était à 96 ou 94, vous me pardonnerez des petites inexactitudes du genre !?
En tout cas, ça fait pas mal sauter derrière. Quand attaque Nico Chatelet, également en danseuse. Nico, il fait environ mon poids - si on m'enlève une jambe et un bras.
Ca devient dur, là. Nous sommes 4 à suivre, deux de "Comminges" (je crois), moi, et un mec avec le maillot de l'Ariégoise, bientôt lâché. A environ mi-col, je suis le suivant à être lâché. Pendant un long moment, je garde les trois mousquetaires en vue dans la brume épaississante, mais l'épaississement de celle-ci et mes forces vacciliantes aidant, je ne vois bientôt plus que tchi. La voiture suiveuse les donne proche du sommet à 1 minute, les poursuivants à 3 min. Il reste de l'espoir. Pour l'instant.
En haut, je remplis mes bidons - n'ayant personne pour me faire un service bidon, je suis obligé de m'arrêter. Etant le premier à m'arrêter de la sorte au ravito, les bouteilles d'eau sont encore toutes bien emballé sous plastique avec les bouchons fermement vissés. J'apprécie.
Au début de mon arrêt, un coureur me dépasse en trombe. Je crois que c'était Olivier le Court.
Je fais la descente tout seul, dans une brume agrémenté de crâchotin. La vue est acceptable, le freinage et l'adhérence un peu moins. Je ne prends aucun risque, et je dois perdre encore un bon paquet de secondes / minutes sur cette descente.
S'en suit un autre faux plat où le parcours rejoint celui de la Montagnoule. Je suis un peu perdu, n'ayant pas d'écarts....
Tout en bas du col de Saraillé, un groupe de 6 avec plusieurs favoris (dont Seb Pillon) me ratrappe (en trombe). Je les accroche, au début sans difficultés, mais après 500 m dans le raide, je suis lâché. Je comprends pourquoi. Je n'arrive plus à atteindre mon seuil. Rupteur à 160 bpm, où sur le col précédent il avait été au delà de 170. Je continue à gaiement doubler les coureurs de la Montagnoule, mais 2 autres coureurs de l'Ariégeoise me doublent, moi.
Comment font-ils pour aller si vite ?
Petit coup de gueule à propos des ravitos, en haut des cols et ailleurs: Les coureurs de la Montagnoule s'arrêtent partout pour s'alimenter, la route est complètement bouchée. Faudrait peut-être leur faire un topo au départ en insistant sur le fait que la parcours est partagé avec l'Ariégeoise et qu'il y a des gens qui courent pour un bonne place, susceptibles de passer. Enfin, ce n'est plus mon cas, mais je trouve ça agaçant quand même.
La descente du Col de Saraillé est sèche, mais je ne fais plus de zèle. Je sais que ma course est pliée, je sais que je ne vais pas pouvoir faire la XXL, et j'appréhende énormément le Port de l'Hers.
Et j'ai raison. Car là, mon cardio ne plafonne plus à 160 mais, à 150. Je n'ai pas trop mal aux jambes, mais je n'ai pas de force, et une fatigue mélangé à de la lassitude grandissante s'empare de moi. Quelques autres coureurs de l'Ariégeoise me doublent. A 7 km du sommet, je m'arrête, je m'assois dans l'herbe, et je me fais une petite pause "barre". Des gens me demandent si ça va. Ma foi, oui, ça va, je ne suis pas à l'agonie. Mais ma forme est à des années lumières de ce qu'elle devrait être.
La pause a ceci de bien qu'elle me permet de faire la deuxième partie de la montée sans trop de souffrance, j'arrive même à rattraper deux coureurs de l'Ariégeoise. Mais je me fais doubler par bien davantage.
La dernière descente me procure encore un semblant de plaisir, avec des bouts droits à 10, 11 %. Incroyable, tous les coureurs de la Montagnoule sont sur les freins. C'est pas difficile pourtant, d'aller tout droit en descente ?
En arrivant, je ne regarde même pas mon placement. Je sais que sur les 2 longs parcours, ils doivent être une quarantaine devant moi. J'apprendrai dans la soirée par un pote que je fais 14 sur l'Ariégeoise. C'est une bonne place, dans l'absolu, mais loin, loin de mes possibilités en possession de mes pleines capacités. La puissance était là, au début, mais l'endurance m'a cruellement faite défaut. Je sais que le problème n'était pas d'avoir trop mis au départ - j'ai fait pareil par le passé et tenu jusqu'au bout. Non, il y a une couille dans le potage, quelque part.
Un des 4 mecs de notre échappé au col de la Core m'interpelle, Christophe Robin, si mon souvenir est bon. Très gentil garçon. Il a gagné l'Ariégeoise, il a dû abandonner le parcours de la XXL pour problèmes techniques.
Il me parle d'un problème qu'il a eu lui-même par le passé - anémie. Les symptômes collent aux miens. Je vais faire une analyse de sang.
La foule à l'arrivée me gave. On peut à peine avancer d'un mètre, tellement on est enserré dans des vélos de tout part. Je ne suis pas dans mon assiette. Parlant d'assiette, je ne vois même pas où est servi le repas. De toute façon, j'en ai marre. Je retourne en vélo à Tarascon, je bouffe un sandwich, et je rentre. Dans la voiture, une fatigue écrasante s'abat sur moi. Je voudrais sortir de la nationale pour me garer, faire un somme dans la voiture. Mais il n'y a pas de parking sur une cinquantaine de km. A un moment, j'ouvre les yeux (qui s'étaient donc fermés sans mon autorisation), et je vois que je suis en train de traverser la nationale en diagonale. Je m'étais endormi.
Au péage de Pamiers, enfin le parking. J'écrase pendant une heure, et j'arrive à la maison le moral dans les chaussettes et me sentant le double de mon age.